Une scène inhabituelle a marqué l’arrivée du deuxième contingent de pèlerins mauritaniens en Arabie Saoudite cette semaine. À leur descente d’avion, les fidèles ont été accueillis par un dispositif de sécurité renforcé comprenant des unités cynophiles spécialisées dans la détection de stupéfiants. Un protocole de contrôle rigoureux a été mis en œuvre, suscitant étonnement et interrogations parmi les pèlerins.

Selon plusieurs témoignages recueillis sur place, ce type de dispositif est sans précédent dans le cadre du Hajj, une période marquée habituellement par une grande solennité. Aucun produit illicite n’a toutefois été découvert et les opérations se sont déroulées dans le calme, sans incident notable.

La démarche des autorités saoudiennes s’inscrit dans un contexte de sécurité particulièrement précaire. Au cours des derniers mois, la Mauritanie a été le théâtre de nombreuses saisies significatives de drogues, notamment des substances psychotropes d’une grande dangerosité. De plus, la circulation de médicaments contrefaits constitue un risque alarmant pour la santé publique. Ces interventions répétées des forces de sécurité mauritaniennes ont suscité l’intérêt de la communauté internationale envers la situation dans le pays.

Ces événements récents semblent avoir contribué à une vigilance accrue des autorités saoudiennes vis-à-vis des voyageurs en provenance de Mauritanie, même lorsqu’il s’agit de pèlerins. Selon des analystes sécuritaires, les contrôles renforcés ne visent pas une stigmatisation particulière, mais traduisent une logique de précaution dans un contexte de trafic transfrontalier de plus en plus complexe.

En Mauritanie, cet épisode a provoqué des réactions partagées. Si certains dénoncent une atteinte symbolique à la dignité des pèlerins, d’autres y voient un signal d’alarme. « Le recours à des chiens renifleurs devant des personnes âgées, venues accomplir l’un des actes les plus sacrés de l’islam, est difficilement acceptable sur le plan culturel et spirituel », a déclaré un responsable d’association religieuse à Nouakchott.

D’autres voix appellent plutôt à renforcer les mécanismes internes de lutte contre le narcotrafic et à restaurer la crédibilité du pays à l’étranger. « Ce contrôle est peut-être choquant, mais il nous renvoie à une réalité plus large : celle d’une image nationale fragilisée par l’ampleur du trafic de drogue sur notre territoire », analyse un expert en gouvernance sécuritaire.

Pour les autorités mauritaniennes, le défi est double : défendre la dignité des citoyens à l’étranger tout en assurant une coopération efficace avec les pays partenaires dans la lutte contre le crime organisé. Certains appellent à une action diplomatique discrète mais ferme pour éviter la généralisation de ce type de traitement aux pèlerins futurs, tout en s’attaquant aux racines du problème : les réseaux de trafic et les failles dans le contrôle des frontières.

Ce contrôle strict rappelle enfin une réalité parfois ignorée : la réputation d’un pays se joue aussi dans le regard porté sur ses citoyens ordinaires. Et dans un moment aussi sacré que le pèlerinage, cette réputation devient une question d’honneur collectif.

Mohamed BNEIJARA

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