Dans un contexte national délicat, caractérisé par la pauvreté, la migration, l’insécurité alimentaire et un fossé grandissant entre la classe politique et les citoyens, la Mauritanie se prépare à engager un dialogue politique destiné à apaiser des tensions de plus en plus croissantes. Le président Mohamed Cheikh El Ghazouani a récemment rencontré plusieurs leaders de partis politiques, dont Ahmed Daddah, fondateur du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), Mohamed Maouloud, président de l’Union des Forces de Progrès (UFP), et Biram Dah Abeid, député et leader du mouvement anti-esclavagiste. Ces discussions pourraient ouvrir la voie à un dialogue politique, bien que le scepticisme de l’opposition quant à son succès soit palpable.

Un des principaux points de controverse concerne la nomination de Moussa Fall comme facilitateur de ce dialogue, qui a divisé l’opinion publique. D’un côté, certains soutiennent que Moussa Fall possède les compétences et la maturité nécessaires pour réussir dans cette tâche. En revanche, ses opposants critiquent ce choix, le percevant comme une continuité d’une classe politique vieillissante, jugée responsable de nombreux problèmes du pays. Ils considèrent cela comme la perpétuation d’un système dominé par une gérontocratie, où les mêmes personnes continuent de diriger.

De plus, une critique récurrente pointe l’exclusion des populations des régions intérieures du pays. Comme observé lors de l’IFTAR du mois de Ramadan, ce dialogue semble se restreindre aux acteurs politiques de Nouakchott, tandis que de nombreux partis, sans élus, peinent à légitimer leur représentation de la population dans son ensemble.

Le principe d’un dialogue politique doit reposer sur un libéralisme fondé sur un consensus rationnel et une évaluation critique des points de vue de chacun. Un dialogue efficace permettrait aux participants de confronter leurs opinions et de proposer des solutions significatives aux enjeux du pays. Il est essentiel d’inclure divers groupes d’intérêt, qui, bien que partageant des préoccupations communes, peuvent avoir des enjeux divergents. L’objectif consiste à favoriser une meilleure compréhension mutuelle, permettant à chaque acteur d’appréhender les problématiques sous différentes perspectives. Un dialogue bien conduit peut devenir un puissant levier de plaidoyer et un outil crucial pour améliorer les politiques publiques.

Il n’existe pas de modèle unique pour un dialogue politique, mais certaines conditions sont nécessaires pour garantir son efficacité. Un cadre structuré et limité, avec un nombre restreint de participants soigneusement choisis, est souvent privilégié. Les discussions doivent inclure des figures influentes et réfléchies, capables de défendre des intérêts spécifiques et de faire avancer le débat. Il est crucial de concentrer les discussions sur un nombre limité de questions majeures, pouvant être abordées de manière réaliste. Un dialogue fructueux devrait aboutir à des engagements concrets, susceptibles d’être réalisés par toutes les parties concernées.

Il est préférable d’avoir un nombre restreint de participants avec des objectifs clairs. L’événement devrait être réservé aux personnes invitées, afin de garantir des discussions ciblées et productives. Les représentants doivent être choisis stratégiquement en fonction des intérêts qu’ils défendent et de leur influence politique. Limiter le nombre de groupes d’intérêt impliqués est indispensable pour éviter la dispersion des objectifs et le gaspillage de temps sur des sujets secondaires. La présence de décideurs, capables de transformer les propositions en actions concrètes, est également primordiale.

Le succès du dialogue politique en Mauritanie dépendra de la volonté réelle des acteurs politiques de s’engager dans une discussion sincère et inclusive. La crédibilité du processus reposera en grande partie sur la capacité des organisateurs à surmonter les clivages traditionnels et à proposer un cadre constructif et ouvert.

Mohamed BNEIJARA

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *