La Mauritanie vit un moment décisif. Dans un pays où 80 % de la population a moins de 35 ans, continuer à gouverner comme si rien n’avait changé est devenu un risque majeur pour la stabilité nationale. Les défis sécuritaires, sociaux et politiques s’accumulent, et chacun voit que le pays pourrait basculer si la majorité démographique reste en marge des décisions.

Le Président Mohamed Cheikh El Ghazouani l’a pourtant affirmé clairement : son second mandat devait être « pour les jeunes et avec les jeunes ». Ce slogan avait suscité de l’espoir, un souffle d’attente, l’idée qu’un tournant historique était enfin possible. Mais cet engagement ne pourra prendre sens que s’il devient une réalité tangible, visible, structurante — pas un simple rappel lors des discours officiels.

Pendant ce temps, des millions continuent à être engloutis dans des festivals, des cérémonies, des événements ponctuels qui ne changent absolument rien au quotidien de la jeunesse. Des budgets capables de financer des centaines de microprojets, des centres de formation, des espaces de dialogue, finissent dans des manifestations symboliques qui ne créent ni emploi, ni inclusion, ni confiance. Ces dépenses massives sont un luxe que le pays ne peut plus s’offrir alors que tant de jeunes sont sans perspectives.

La vraie transformation doit passer par la création, dans chaque wilaya, d’un cadre régional permanent de dialogue multi-acteurs, où les jeunes ne seraient plus des invités de circonstance, mais des acteurs centraux. Un espace où ils identifient eux-mêmes les priorités, proposent des solutions, préviennent les tensions communautaires et participent à la gestion publique. Un espace où l’on décide, où l’on tranche, où l’on construit — et non pas un lieu de décor pour les caméras.

Le pays a besoin d’un renouveau profond de son leadership. Pas pour opposer les générations, mais pour rééquilibrer un système qui, depuis trop longtemps, laisse les jeunes à la périphérie. Le dynamisme, la créativité, la lucidité de cette majorité démographique doivent enfin irriguer les institutions, les structures de gouvernance, les espaces de décision et les organisations politiques. C’est ainsi que l’on redonnera espoir à une jeunesse qui ne veut ni privilèges ni slogans, mais une place réelle dans la construction du pays.

La vérité est simple : aucune stabilité durable n’est possible sans l’intégration de la jeunesse dans la gouvernance. Lorsqu’elle participe réellement, les décisions deviennent plus pertinentes, plus légitimes, plus proches des réalités. La confiance revient, la méfiance recule, la cohésion nationale se renforce.

La Mauritanie est à la croisée des chemins. Soit elle donne enfin un contenu concret à la promesse d’un mandat « pour les jeunes et avec les jeunes », soit elle laissera s’installer une fracture dont les conséquences seront lourdes et durables. Le pays ne peut pas continuer sans sa majorité. Il est temps d’ouvrir la voie, de rompre avec l’ancien modèle et de permettre à la jeunesse de devenir ce qu’elle est déjà : la force centrale de l’avenir mauritanien.

Mohamed BNEIJARA

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