Depuis huit décennies, les Nations Unies incarnent l’espoir d’un monde meilleur en rassemblant les nations dans une lutte commune pour la paix, le développement durable et la solidarité internationale. Cependant, à l’occasion de ce 80e anniversaire, une analyse critique s’impose : le système des coordonnateurs résidents, pilier de l’action onusienne sur le terrain, montre aujourd’hui ses limites. Selon une évaluation interne récente, « le système demeure difficile à mettre en œuvre et ses résultats sont limités », ce qui invite à repenser la manière dont l’ONU peut répondre efficacement aux défis contemporains. En Mauritanie, confrontée à des problématiques complexes telles que la sécurité alimentaire, la gestion des réfugiés ou le changement climatique, cette situation revêt une importance particulière. La dépendance historique aux programmes de solidarité et de développement de l’ONU doit désormais s’accompagner d’une adaptation stratégique urgente. Si aucune action n’est entreprise rapidement, les conséquences pourraient être catastrophiques : recul des progrès en matière de développement, aggravation des inégalités, voire fragilisation de la stabilité sociale et sécuritaire du pays.

Selon le rapport 2023 des Nations Unies, 79 % des Objectifs de Développement Durable (ODD) restent hors de portée dans de nombreux pays, et cette situation pourrait empirer si les institutions mondiales ne se réforment pas et ne renforcent pas leur présence concrète sur le terrain. La Mauritanie, bénéficiant d’un appui constant mais limité, doit aujourd’hui exiger une efficacité accrue pour faire face à ses enjeux majeurs : sécurité alimentaire, gestion des réfugiés, résilience face au changement climatique et lutte contre la pauvreté. À défaut, ses efforts de développement risquent de s’essouffer, laissant ses populations vulnérables face à des crises croissantes. Le système des coordonnateurs résidents, renforcé par la réforme de 2019, visait à améliorer la coordination et l’efficacité des agences onusiennes dans chaque pays. Pourtant, une évaluation récente révèle qu’il reste confronté à plusieurs obstacles : chevauchements, lenteurs dans la mise en œuvre des projets et manque de flexibilité. Dans un contexte mondial marqué par des crises successives — changement climatique, insécurité, mouvements migratoires — cette inefficacité pourrait avoir des répercussions directes sur le territoire mauritanien, déjà vulnérable face à ces défis.

Alors que le rôle de l’ONU est de plus en plus sollicité, ses ressources se réduisent. Le gel ou la diminution des financements, notamment en provenance de certains grands contributeurs comme les États-Unis, compliquent la mise en œuvre de ses missions. La crédibilité et l’efficacité de l’organisation sont désormais en jeu, ce qui pourrait entraîner une diminution de l’aide internationale et un affaiblissement des partenariats avec des pays comme la Mauritanie. Les dirigeants mauritaniens doivent prendre conscience que leur dépendance aux programmes et à l’appui de l’ONU pourrait être compromise si cette dernière ne parvient pas à s’adapter rapidement aux défis actuels. La solidarité internationale, si elle n’est pas accompagnée d’actions concrètes et efficaces, risque de devenir un simple symbole, laissant le pays seul face à ses crises. Face à ces enjeux, une réforme en profondeur de l’organisation des Nations Unies s’avère essentielle. Certains experts proposent une décentralisation accrue, une gouvernance plus participative impliquant les acteurs locaux, ainsi qu’une réforme du Conseil de sécurité pour mieux refléter la réalité du contexte mondial. La Mauritanie, en tant que partenaire clé, doit exiger des engagements solides, améliorer la coordination avec ses partenaires et renforcer ses capacités afin de tirer au maximum parti de l’aide internationale.

À 80 ans, l’ONU n’est pas dépassée, mais elle doit se réinventer pour rester pertinente. La Mauritanie ne peut pas se permettre d’attendre que la crise devienne irrémédiable. Elle doit dès maintenant préparer sa voix et demander des mesures concrètes pour que l’aide internationale soit adaptée, efficace et durable. Faute de quoi, l’avenir de ses populations pourrait être compromis, dans un contexte où la stabilité et le développement global sont plus que jamais en jeu. Les dirigeants mauritaniens doivent comprendre que la réussite du partenariat avec les Nations Unies dépend de leur capacité à demander des changements, à renforcer leur résilience et à anticiper les crises susceptibles d’affaiblir davantage le pays. La solidarité internationale doit devenir une réalité tangible, permettant à la Mauritanie de ne pas rester à la merci des enjeux mondiaux, mais de devenir un acteur de son propre avenir.

Mohamed BNEIJARA

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