a Génération Z est en train de prendre son envol, et rien ne semble pouvoir l’arrêter. Depuis le Népal, l’Indonésie, Madagascar et le Maroc, elle s’affirme comme une force mondiale qui remet en question les anciens modèles politiques et sociaux. Connectée en permanence au reste du monde, cette jeunesse observe quotidiennement, à travers l’écran de son téléphone, les injustices, les inégalités et l’incapacité des dirigeants à répondre à leurs attentes. Elle compare, tire des leçons et sait que d’autres jeunes, ailleurs, se sont levés pour faire trembler leurs gouvernements et faire entendre leur voix.
En Mauritanie, plus de 60 % de la population est jeune. Soixante pour cent ! Comment un pays peut-il encore prétendre garantir sa stabilité et sa cohésion sociale en ignorant cette majorité ? La réalité est brutale : nos politiques, nos programmes et les milliards investis au nom de la jeunesse ne transforment en rien son quotidien. La plupart des projets sont conçus loin d’elle, dans des bureaux de Nouakchott, par des décideurs qui ne l’écoutent pas, ne la comprennent pas, et ignorent même ce qu’elle attend réellement. On organise des festivals pour la jeunesse, mais on en interdit l’accès aux moins de 50 ans. C’est une caricature, une insulte à l’intelligence de toute une génération.
Pendant ce temps, le monde évolue. Les progrès scientifiques prolongent la vie des aînés et repoussent leur départ, tandis que les postes de responsabilité, déjà rares, se ferment encore davantage aux jeunes. Par ailleurs, les avancées technologiques remplacent les humains par des machines et des applications : un milliardaire peut gérer sa fortune avec une dizaine d’employés et un logiciel. Résultat : la jeunesse se retrouve sans place, sans perspectives, sans avenir, alimentant colère et désespoir.
Une jeunesse sans avenir devient une bombe sociale. C’est une réalité que nul pouvoir ne peut ignorer. La Génération Z ne peut plus être manipulée par des discours ethniques, féodaux ou religieux. Elle refuse la division, partage les mêmes souffrances, humiliations et défis. Elle se montre plus solidaire, plus consciente, et surtout, plus exigeante.
Le danger est évident : une jeunesse ignorée finira toujours par se faire entendre. Si l’État mauritanien ne fait pas preuve de clairvoyance, de prévoyance et d’anticipation, ce mouvement mondial viendra frapper à nos portes, sans demander la permission. Ceux qui croient pouvoir apaiser cette génération par des promesses ou quelques milliards mal dépensés font fausse route. La Génération Z ne tolérera plus les faux-semblants.
Il est urgent d’agir. Il faut donner une véritable place à la jeunesse dans les décisions, les politiques publiques, l’économie et la société. Il est temps de l’écouter, de la comprendre et de lui offrir un avenir crédible. Sinon, la Mauritanie pourrait découvrir, peut-être trop tard, que la colère d’une génération abandonnée est plus forte que toutes les vieilles certitudes.
Mohamed BNEIJARA