La prise en charge du paludisme en Mauritanie met en évidence des failles préoccupantes au sein du ministère de la Santé. Les chiffres alarmants des décès dans les hôpitaux, exacerbés par une pénurie de médicaments antipaludiques, soulèvent des questions sur l’efficacité et la réactivité des autorités sanitaires face à cette crise. Il est essentiel de s’interroger sur leur engagement à assurer la sécurité et la santé des citoyens, surtout dans un contexte où la maladie continue de faire des ravages.
La récente déclaration du coordinateur du programme paludisme mérite également une attention particulière. En se contentant d’annoncer la distribution d’un million et demi de moustiquaires, il semble ignorer la gravité de la situation, négligeant ainsi de commenter les tragiques pertes en vies humaines. Cette attitude peut être perçue comme un manque d’empathie, révélant une déconnexion entre les discours officiels et la réalité vécue par la population. Une telle réaction peut avoir des conséquences délétères sur la confiance du public envers les institutions sanitaires et soulève des impératifs d’action immédiate pour remédier à cette crise.
L’année en cours est caractérisée par des précipitations exceptionnelles sur l’ensemble du territoire national, ce qui a favorisé la prolifération des moustiques. Cependant, il est préoccupant de constater qu’aucune mesure d’accompagnement n’a été mise en place pour traiter les zones de stagnation d’eau dans les grandes villes, laissant ainsi la population exposée à un risque accru d’épidémie de paludisme.
À Aleg, le ministre de la Santé, conscient de son devoir moral de se rendre sur place pour évaluer la situation, a été induit en erreur en attribuant la crise à un usage inapproprié des moustiquaires par la population. Ce n’est qu’après avoir observé l’accumulation de médicaments de qualité douteuse, importés d’Asie, qu’il a commencé à prendre la mesure de l’ampleur du problème. En outre, son acceptation d’un don de médicaments dont la date de péremption était imminente pose des questions éthiques quant à la gestion des ressources de santé publique et soulève des préoccupations sur la responsabilité des autorités en matière de protection de la santé des citoyens.
Conformément aux engagements internationaux pris par la Mauritanie, il est impératif que le Programme National de Lutte contre le Paludisme (PNLP) accélère la mise en œuvre de recommandations spécifiques. Une approche inclusive est essentielle pour garantir un accès universel aux services préventifs et curatifs, tout en établissant une confiance solide des populations envers le système de santé.
Pour atteindre cet objectif, le PNLP doit s’assurer que l’accès aux soins liés au paludisme soit généralisé. Cela nécessite de s’aligner sur les systèmes nationaux de protection sociale établis, afin de garantir que tous les segments de la population puissent bénéficier des services de prévention et de traitement. Par ailleurs, la suppression des taxes et des droits de douane sur les intrants antipaludiques apparaît comme une mesure cruciale pour faciliter l’approvisionnement et la distribution de médicaments essentiels.
Le ministère de la Santé doit impérativement renforcer la régulation du secteur pharmaceutique en garantissant un contrôle rigoureux de la qualité des produits, tant à l’importation qu’à chaque étape de la chaîne de stockage et de distribution. Pour maximiser l’impact des interventions, une collaboration proactive avec les structures nationales et internationales, y compris la société civile et le secteur privé, est essentielle.
Il est également crucial d’impliquer les acteurs locaux dans la mise en œuvre des politiques de lutte contre le paludisme. Cela nécessite non seulement de sensibiliser les communautés, mais aussi de promouvoir l’appropriation des stratégies au niveau local. Les agents de santé communautaire (ASC) doivent être formés pour identifier les différentes catégories de populations ainsi que leurs besoins spécifiques, afin d’adopter une approche véritablement inclusive.
Le renforcement de la préparation est crucial pour faire face aux épidémies de paludisme. Il est impératif que des stocks d’antipaludiques soient pré-positionnés dans les districts à risque, afin d’être mobilisés rapidement en cas de besoin. Les actions à entreprendre en situation d’épidémie doivent inclure le traitement de tous les cas confirmés, la pulvérisation intra-domiciliaire et la destruction des gîtes larvaires, conformément aux normes établies.
Le ministère de la Santé doit également mettre l’accent sur le renforcement des compétences du personnel de santé impliqué dans la prise en charge du paludisme. Cela nécessite la mise en place de formations sur les directives révisées de traitement, applicables à toutes les structures de santé, qu’elles soient publiques, parapubliques ou privées.
L’approche inclusive n’est pas seulement une nécessité, mais elle est essentielle pour restaurer la confiance des populations envers le système de santé mauritanien. La coopération avec la société civile, les organisations communautaires et le secteur privé est cruciale pour garantir des soins de qualité et mener une lutte efficace contre le paludisme. Ensemble, en unissant nos forces, nous pouvons combattre cette maladie et protéger les vies des Mauritaniens.
Cette crise du paludisme met en lumière l’urgence d’un plan d’action concret et efficace pour maîtriser la maladie en Mauritanie. Les autorités sanitaires doivent prendre pleinement conscience des enjeux actuels et intensifier leurs efforts pour garantir la santé et la sécurité de la population. La question qui se pose est la suivante : le ministre de la Santé choisira-t-il de maintenir un coordinateur dont les actions semblent compromettre le bien-être des Mauritaniens, ou prendra-t-il les mesures nécessaires pour rectifier la situation ? Les fonctionnaires ne doivent pas être inamovibles ; un changement de personnel pourrait apporter un nouvel espoir et permettre une gestion plus efficace de cette crise. Celui qui n’apporte pas de résultats doit être remplacé.
Mohamed Moustapha