Il est devenu courant, presque à la mode, de voir sur les réseaux sociaux des cadres du secteur public ou privé, ainsi que des citoyens ordinaires, prendre des selfies avec un coq, une vache en train de traire, une chèvre ou aux côtés d’un vieux fermier dans un troupeau, prétendant ainsi illustrer leur soutien aux orientations du Président Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani. Ce phénomène folklorique, censé symboliser une proximité avec les réalités rurales ou populaires, constitue en réalité une dérive communicationnelle sans véritable contenu, qui dénature l’essence même des réformes profondes annoncées par le chef de l’État.

Une telle mise en scène ne devrait en aucun cas être tolérée par les responsables de la communication de la Présidence, surtout à un moment où les véritables orientations présidentielles tardent à se traduire concrètement. Alors que le Président ne cesse de réaffirmer son engagement pour un État plus juste, plus efficace, et au service des citoyens, il est paradoxal — voire insultant — de constater que l’apparence l’emporte sur le fond, reléguant au second plan les priorités stratégiques.

Le programme présidentiel, pourtant ambitieux et clair : celui du Président Ghazouani, repose sur des engagements précis et urgents. Ces orientations dépassent largement les gestes symboliques et touchent au cœur du fonctionnement de l’État. Parmi les priorités essentielles figurent :

  • La réhabilitation de la fonction publique par la mise en œuvre effective des principes de récompense et de sanction ;
  • La réforme du régime des retraites et la revalorisation des pensions ;
  • La séparation stricte entre les postes à responsabilités politiques et les fonctions administratives, selon des critères objectifs et transparents ;
  • La restauration de l’autorité hiérarchique, une évaluation réelle des agents de l’État, et la réorganisation des écoles de formation administrative ;
  • La rigueur dans l’application des réglementations touchant aux secteurs vitaux tels que la santé, l’hygiène, le logement, l’éducation, et le transport ;
  • La lutte contre le cumul d’emplois publics et privés, notamment dans les domaines de l’enseignement et de la santé ;
  • La réforme du système de rémunération des agents publics pour le rendre plus incitatif et équitable ;
  • La modernisation de l’administration à travers l’intégration des technologies numériques et le renforcement de la cybersécurité.

Ce programme, d’une ambition sans précédent, vise à refonder l’État mauritanien sur des bases solides, durables et équitables.

Une trahison silencieuse des engagements : Malheureusement, dans la pratique, peu de ces mesures sont réellement mises en œuvre. Le décalage entre les discours répétés du Président et l’immobilisme, voire le sabotage, d’une partie de l’administration est frappant. La jeunesse, à laquelle le second mandat a été entièrement dédié selon les déclarations du chef de l’État, reste largement marginalisée. Aucun plan stratégique cohérent ne semble lui être destiné, et les politiques publiques actuelles peinent à répondre aux besoins urgents des jeunes, qui représentent pourtant 60 % de la population.

Il est temps d’agir

Le moment est venu pour le Président de faire respecter ses engagements en assumant pleinement ses responsabilités. Il est impératif que l’ensemble des ministères, des directions centrales, des institutions déconcentrées et des collectivités territoriales soit aligné sur la mise en œuvre effective du programme présidentiel. Cela nécessite une exigence de résultats, la reddition de comptes, et la suppression des pratiques superficielles ou populistes qui détournent l’attention de l’essentiel.

La communication officielle ne doit pas se limiter à une vitrine folklorique, mais devenir un levier stratégique pour la transformation profonde de notre pays. Ne pas suivre strictement les orientations du chef de l’État, c’est trahir le pacte social avec le peuple mauritanien et mettre en péril l’avenir d’une nation jeune, pleine de potentiel, mais encore en quête d’un projet collectif partagé.

Mohamed BNEIJARA

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