Mohamed Yahya Fall – A voir ce qui se déroule sous nos yeux, un constat qui s’impose de lui-même. Les mauritaniens sont désunis, séparés. La cohésion sociale et l’unité nationale sont des vœux pieux, tant la fracture sociale est grande.
Le fossé ne cesse de se creuser entre les différentes composantes de la société, du fait de la prégnance du sentiment d’appartenance communautaire, qui prend le pas sur la citoyenneté.
Le déficit de cohésion sociale et la désunion sont tels que les acteurs n’ont pas réussi à réaliser de belles et justes aspirations. La première ambition est liée à la capacité de réaliser un État d’unité ou, du moins, de protéger le premier noyau, qui n’est autre que le peuple, la société. La deuxième ambition est de renouveler et d’approfondir la pensée nationale, le ciment qui lie les organes du corps social.
Par conséquent, l’action politique est caractérisée par deux remarques. En principe, la première c’est l’absence de pensée critique de ses propres expériences, et la seconde c’est l’incapacité d’atteindre les caractéristiques préliminaires d’un cadre susceptible d’unifier la lutte, de rassembler les capacités et d’unifier les forces, organisations et partis politiques au niveau national autour du grand rêve mauritanien. Quel est-il, d’ailleurs, ce grand rêve ?
Il est évident que le peuple mauritanien est fragmenté, morcelé, marqué au fer rouge directement ou indirectement par des plaies restées encore béantes. Ce qui constitue une menace perpétuelle de son unité.
Si le colonialisme avait réussi à fragmenter la nation, alors certaines forces rétrogrades ont « continué » le travail pour achever la politique de trébuchement, de désintégration, de fragmentation et de sape, qui a généré du fait de la politique et du comportement des politiciens une forte tendance négative à affronter l’idée d’unité et à questionner les arguments. Ce qui a fait de l’unité une idée anachronique, désincarnée et en crise.
Cette image est présente aujourd’hui à toutes les occasions.
Maures Haratines Peuls Soninké Wolof Bambaras
Cette pluralité demeure tributaire de la cohésion de ces entités au sein même de la société. A défaut, il en résulte une situation tragique qui jette une ombre sur la réalité plurielle du peuple mauritanien. Un premier acte en faveur de l’unité nationale consiste à en prendre conscience. D’où l’importance de changement de mentalité, de psychologie, pour changer les archaïsmes.
Les conditions dans lesquelles nous vivons et les souffrances que nous vivons suivent la logique de l’anéantissement et de la division et s’écartent de la logique qui a donné naissance à la naissance de la République Islamique de Mauritanie 28 novembre de l’année 1960.
Alors quelle est notre responsabilité dans ce que nous avons atteint ? Comment la situation désastreuse peut-elle être surmontée? Est-il possible de protéger les entités existantes après qu’elles se sont rebellées les unes contre elles ?
Brandir ad vitam æternam des slogans unitaires sans les lier à la réalité objective et à la pratique quotidienne ne sert absolument à rien. L’idée en devient un idéal désincarné, imaginaire, non objectif et irréaliste…
Cette situation est renforcée par la culture orale dominante d’une part, l’absence de programmes politiques d’autre part, la marginalité de l’esprit de responsabilité d’autre part. Sans oublier le modèle de l’éducation politique, et la superficialité de la pensée politique.
Donc, une logique démagogique domine, qui se résume dans l’expression orale sans l’action propre à réaliser, à vivre l’unité tant proclamée. Cela est d’autant plus vrai que l’absence de projet unitaire est un facteur aggravant.
Dès lors, il n’est pas difficile, en passant en revue le parcours des nationalistes et leurs cadres organisationnels, de constater l’enthousiasme et la marginalité des retours, le grand nombre de discours et le manque d’acquis, la justesse des prêches et le manque d’efficacité. … qui a rapproché l’idée du nationalisme du « totem » sacré qu’il est facile d’avaler en cas de besoin et de transformer celui qui l’avale en un « saint ».
De sorte que ça en devient un mensonge qui ne le touche pas ni ne l’atteint. Par conséquent, la majorité des nationalistes sont encore hantés par le beau rêve, mais ils sont incapables de le réaliser sur le terrain. Ainsi ils sont à mille lieues de leur idée au sens politique et en termes de pratique. Il peut être subjectif de comparer le climat intellectuel et politique dans lequel a émergé la première expérience unitaire de l’histoire arabe moderne avec la situation actuelle et ses déséquilibres.
Cependant, d’un autre côté, il est tout aussi subjectif d’accepter l’injustice. De pacifiques citoyens sont privés de leurs droits les plus élémentaires du fait de la mainmise d’un réseau occulte de thieb-thieb.
Tel est le cas de Coumba Diallo, d’Esma, d’Ethmane Habib. Ce dernier, malgré l’obtention d’une note de 16,90 avec mention Très Bien, à été privé de sa bourse d’études par des thieb-thieb qui sapent les espoirs de notre jeunesse et détruisent notre unité nationale. Un ministère qui refuse d appliquer une décision de justice qui pourtant rétablissait ce brillant gamin dans ses droits..
Cette situation signifie-t-elle pour autant l’impossibilité et la mort de l’idée d’unité nationale ?!… Que nenni.
L’exacerbation de la fragmentation et du morcellement du peuple, le déficit de cohésion sociale, nous poussent à lutter contre les assignations à résidence communautaire et les retranchements communautaires.
Pour ce faire, nous invitons les mauritaniens à sortir de leurs particularismes communautaires et leur zone de confort social. Pour ce faire, il est primordial d’adopter la pédagogie de la citoyenneté…
Une autre tare qui traverse notre société est la féodalité présente chez tous les Mauritaniens toutes communautés confondues…
Le plus affligeant est de constater que de brillants esprits logés dans ces zones de « confort » féodal peinent à s en affranchir…
Cet appel est pressant, car il s’agit d’un véritable cri du cœur. L’État, les partis politiques, les organisations de la société civile, les Oulémas, les notables, les chefs coutumiers, les intellectuels, la presse, tous doivent être mis à contribution pour l’avènement de l’unité nationale, de l’honneur, de la fraternité, de la justice. La Mauritanie le mérite, nous le méritons.
Pour que cessent certaines injustices. Il serait avantageux pour nos autorités d’insérer le problème de.l unite nationale et de la cohésion sociale dans leur programme et d’en faire un des thèmes centraux de la prochaine élection présidentielle, car il y a un besoin criant de rassembler afin de faire face aux archaïsmes qui plombent toute velléité de changement de progrès.
Cette pédagogie appropriée amènera l’État à faire cesser toutes les discriminations, toutes les aberrations en rétablissant les victimes dans leurs droits.
Il est temps de panser les plaies béantes que sont le passif humanitaire, le problème des déportés à l’étranger (qui doit être résolu).
Tout le monde doit contribuer à la création d’un climat sain, propice, de cohésion, d’entente, de respect, d’amour, de considération. Acteurs politiques, intellectuels, Oulémas, chefs coutumiers, notables, sont invités à apporter leur concours…
Mohamed Yahya Fall
Cohésion et unité nationale now and not tomorrow !