En Mauritanie, l’inaudible « non » au projet de révision de la Constitution

Écrit par Eclairage le . Publié dans Sécurité alimentaire

Le Monde - La quasi-totalité des partis d’opposition boycottent le référendum portant notamment sur la suppression du Sénat et la modification du drapeau. Quelque 1,4 million de Mauritaniens sont appelés aux urnes, samedi 5 août, pour dire « oui » ou « non » à un projet de révision de la Constitution. 

Elaboré en septembre et octobre 2016 lors d’un dialogue entre le pouvoir et l’opposition modérée, le projet prévoit la suppression de plusieurs institutions : le Sénat, qui serait remplacé par des conseils régionaux élus, la Haute Cour de justice, le médiateur de la République et le Haut Conseil islamique.

Lors du référendum, les électeurs devront aussi se prononcer, dans une urne séparée, sur la modification du drapeau national. En mars 2017, la révision avait été adoptée par les députés mais rejetée par les sénateurs, pourtant majoritairement favorables au pouvoir. 

La décision du chef de l’Etat, Mohamed Ould Abdel Aziz, de passer outre au rejet du projet par le Parlement en le soumettant à référendum a provoqué une controverse, l’opposition et des constitutionnalistes contestant la légalité de cette procédure.

Le président, qui a fait campagne dans tout le pays, appelle à un « oui massif » et accuse l’opposition de vouloir « créer le chaos dans le pays ». Il a promis mardi soir de faire des « révélations » dans un meeting de clôture jeudi à Nouakchott, accusant de « corruption » les sénateurs opposés au projet et invitant le peuple à « éliminer cette chambre dangereuse pour l’avenir du pays et de sa démocratie ».

« Battage médiatique »

La majorité des partis de l’opposition boycottent ce référendum, qu’ils jugent « inconstitutionnel ». De ce fait, ils sont exclus du temps d’antenne de la campagne officielle, selon la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la presse.

Seule une formation de l’opposition radicale, la Convergence démocratique nationale (CDN), de Mahfoudh Ould Bettah, appelle les électeurs à se rendre aux urnes, pour voter « non ». Tous les autres partis en campagne, de la majorité ou de l’opposition modérée, appellent à voter « oui ».

Résultat : la CDN dénonce une « campagne inégalitaire », le « oui » bénéficiant de la quasi-totalité du temps d’antenne officiel. « Nous menons une campagne difficile et inégalitaire en termes de répartition du temps d’antenne », a déclaré Mahfoudh Ould Bettah à l’AFP mardi soir, estimant à « 1 % seulement » le temps accordé à son parti dans les médias publics.

« Nous avons une minute à la télévision officielle et une minute et demie à la radio nationale, alors qu’une centaine de partis politiques prônant le “oui” bénéficient du reste, soit 99 % du temps réglementaire », a-t-il déploré.

« Malgré ce battage médiatique des partisans du “oui”, nous avons la certitude que les Mauritaniens rejetteront ce projet anticonstitutionnel et contraire à leurs choix démocratiques », estime l’opposant, dénonçant un « manque de neutralité de l’administration et de l’armée » et des interdictions de tenir des meetings dans certaines villes. Les résultats du référendum sont attendus en début de semaine prochaine.

Le Monde.fr avec AFP


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